Les forfaitures de la droite

L’UMP a changé de nom. Histoire de laisser derrière soi les affaires, les casseroles, les scandales, ils se prétendent républicains alors même qu’ils en piétinent les valeurs depuis des années. Comment pourrait-on s’étonner de pareille imposture avec Sarkozy ?
Il aurait changé nous dit-on… encore. Le spectacle qu’il donne n’en demeure pas moins toujours le même : agité, agressif, ambigu voire contradictoire, prêt à tout… Les militants et, plus encore, les cadres de l’UMP semblent ne plus être dupes. Plus probablement, ils doivent être lassés et ne voient plus très bien comment il pourrait rassembler les Français, ou, au moins, un peu plus de la moitié d’entre eux. En s’éloignant de leur ancien héros charismatique, ils font preuve aussi bien de lucidité que de lâcheté. Les rats quittent le navire.

Symétriquement, on nous présente Alain Juppé comme l’antithèse du nabot. Il serait calme, posé, rassurant, à la fois ouvert et solide. Toutes les vertus lui sont prêtées et, depuis plusieurs mois, on nous le présente comme l’alternative possible pour 2017. Moins il intervient dans les médias et le débat public, plus il monte dans les pronostics… Juppé rendrait sa dignité au « grand parti de la droite républicaine », comme on l’appelle. Il n’aurait rien à voir avec les excès de l’ère Sarkozy qu’il enterre sans fleur ni couronne. Avec lui, les François Fillon, les Nathalie Kosciusko-Morizet, les Bruno Le Maire et autres représentants d’une droite plus présentables prendraient aujourd’hui leur revanche sur la sarkozye pure et surtout dure : les Nadine Morano, Brice Hortefeux, Claude Guéant et consorts qui les auraient tant maltraités ces dernières années.
Si seulement.

Hélas !, ce n’est pas si simple. À une époque, on pouvait ne pas être d’accord avec les dignitaires du parti de droite, même radicalement, le débat demeurait à l’intérieur des frontières de la confrontation d’idées. Il était même possible de montrer de l’empathie, de la sympathie, voire des convergences de valeurs avec certains d’entre eux : Jacques Chirac, Philippe Séguin, mais aussi, alors, Alain Juppé, François Fillon ou Nathalie Kosciusko-Morizet, autant de politiques que l’on ne pouvait soupçonner de ne pas vouloir œuvrer pour le bien commun et avec qui même les adversaires les plus farouches pouvaient entamer un dialogue. Ça, c’était dans les années 1990 et même au début des années 2000. C’était hier.

Cette époque est révolue. Le quinquennat sarkozyste a fait basculer la France dans une nouvelle ère. En cinq ans, le mal infligé au pays est trop profond pour ne pas laisser de cicatrices. Surtout, parachevant le travail de sape réalisé pendant ces années, la campagne électorale de 2012 a marqué une rupture nette dans l’histoire de la droite. Pendant ces quelques semaines, le candidat-président a fait sauter toutes les digues longuement construites par ses prédécesseurs, en particulier Jacques Chirac. Sarkozy prétendait combattre les « tabous », c’est la décence qu’il a atomisée. Dans ses discours, l’obscénité est allée crescendo jusqu’à cette période détestable entre les deux tours où, visiblement, tout était permis pour draguer de la manière la plus vulgaire les franges les plus droitières.
Dépassant Marine Le Pen sur sa droite, Sarkozy a fait du Maurras.

Or où étaient-ils alors les Juppé, les Fillon, les Kosciusko-Morizet ? Quand leur idole foulait aux pieds tout ce qu’ils avaient défendu jusqu’à présent, leurs voix se sont-elles élevées pour lui rappeler l’histoire de sa « famille politique » ? Ont-ils pris publiquement leurs distances ? La porte-parole a-t-elle contredit son candidat ?
Non.
C’est dans cette courte période de campagne qu’ils se sont définitivement fourvoyés. Qu’ils ont perdu leur honneur et leur crédibilité. Assis au premier rang, ils ont hoché la tête, ils ont cligné de l’œil et ils se sont tus. Ils ont participé au naufrage éthique de leur parti. Cette tache ne pourra jamais être effacée. Même par un changement de nom en forme de hold-up.

Cincinnatus,

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Cincinnatus

Moraliste (presque) pas moralisateur, misanthrope humaniste, républicain râleur, universaliste lucide, défenseur de causes perdues et de la laïcité, je laisse dans ces carnets les traces de mes réflexions : philosophie, politique, actualité, culture…

2 réflexions au sujet de “Les forfaitures de la droite”

  1. Très beau concis clair… Conclusion bien amenée qui résume l’essentiel qu’il ne faut pas oublier malgré la tentative de maquillage… CQFD on a envie de dire !!! CinciQu’ilFautDire…

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